Le pari de la nostalgie
Tormented Souls 2 se présente comme une suite directe du premier opus, tout en s’inscrivant dans la tradition du survival horror à l’ancienne. Avec ses caméras fixes, son ambiance macabre, ses énigmes cryptiques et sa jouabilité volontairement rigide, il affiche dès les premières minutes une volonté claire : faire revivre les codes des années 90 et début 2000. Il ne cherche pas à moderniser le genre, mais à en restaurer l’essence. Ce choix audacieux place le jeu à contre-courant de la production actuelle, souvent tournée vers l’action, les mondes ouverts ou les expériences plus guidées. Le joueur est ici livré à lui-même, dans un univers hostile, étrange, et volontairement opaque. Tormented Souls 2 ne tend pas la main. Il observe. Il juge. Et il punit.
Un cauchemar qui respire la mort
Le premier contact avec Tormented Souls 2 frappe par la force de son ambiance visuelle et sonore. Le jeu prend place dans un univers macabre inspiré du baroque et du gothique, où chaque pièce semble suinter la maladie et la souffrance. Murs décrépis, statues inquiétantes, autels sacrificiels, hôpitaux dévastés… chaque recoin du décor a été pensé pour provoquer un malaise. L’éclairage y joue un rôle fondamental : rarement naturel, souvent artificiel, il découpe l’espace en zones d’ombres et de lumière, créant des contrastes oppressants. Le sound design, quant à lui, est chirurgical. Les couinements de métal, les respirations lointaines, les bourdonnements sourds… tout concourt à nourrir une peur diffuse, permanente, plus psychologique que spectaculaire.
Les ennemis, dans leur design, ne laissent aucune place à la pitié. Humanoïdes tordus, machines à moitié vivantes, silhouettes difformes couvertes de sang séché… L’influence de Silent Hill est palpable, mais digérée. Le jeu ne se contente pas de copier : il réinterprète. Et surtout, il laisse peu de répit. Même dans les zones supposées sûres, quelque chose dérange. Un bruit. Une ombre. Une absence. La jouabilité de Tormented Souls 2 ne fait aucun compromis. Caméras fixes, mouvements rigides, système de visée lent et combat maladroit : tout rappelle l’ère PS1. Pour certains, c’est un plaisir retrouvé ; pour d’autres, une punition inutile. Ce gameplay est à la fois un hommage et un filtre : seuls les joueurs prêts à accepter ces contraintes pourront apprécier l’expérience dans sa globalité.
Les combats restent le point faible. Lents, imprécis, parfois injustes, ils peinent à convaincre. Les ennemis peuvent surgir hors-champ, les collisions sont capricieuses, et l’absence de recul ou de fluidité donne parfois l’impression de se battre contre le jeu, plus que contre les créatures. Toutefois, ces défauts participent aussi à la tension. La peur ne vient pas uniquement des monstres, mais de l’incertitude : vais-je réussir à viser ? Est-ce que j’ai assez de munitions ? Dois-je fuir ? Le combat devient une ressource à gérer, non une fin en soi.
Là où le jeu réussit pleinement, c’est dans ses énigmes. Chaque puzzle, chaque mécanisme, chaque serrure semble pensé pour ralentir, faire réfléchir, observer. Le joueur doit lire, écouter, combiner. Rien n’est gratuit. L’intelligence de level design et la logique interne des énigmes offrent une satisfaction rare dans le jeu vidéo moderne. C’est dans ces moments que Tormented Souls 2 brille vraiment : quand il arrête d’imiter et devient lui-même.
Entre fascination et frustration
L’histoire de Tormented Souls 2 continue celle de Caroline, survivante du premier épisode, plongée cette fois dans une quête familiale au cœur d’un monde marqué par les rituels occultes et la souffrance psychologique. L’univers narratif reste volontairement flou, composé de documents trouvés ici et là, de dialogues énigmatiques et d’éléments environnementaux à interpréter. Le jeu ne prend pas par la main : il faut chercher, lire, reconstituer. Cela crée une certaine richesse, mais aussi une distance.
Par moments, la narration devient presque inaccessible. Certains événements clés manquent de clarté, les motivations se diluent dans les symboles, et le lien entre certaines zones ou personnages reste confus, même après plusieurs heures. Ce flou contribue à l’ambiance, mais nuit à l’émotion. Il est difficile de s’attacher à Caroline, tant elle semble elle-même étrangère à ce qui lui arrive. Le joueur, tout comme elle, subit plus qu’il ne comprend.
Le rythme souffre également de cette approche. De longs allers-retours, des portes fermées nécessitant des clés précises, des zones entières bloquées jusqu’à avoir compris un détail minuscule… Cela fait partie du genre, mais certains passages manquent de fluidité. Le jeu aurait gagné à mieux équilibrer ses moments de tension et ses respirations. Pourtant, malgré tout, une forme de fascination opère. On veut comprendre. On veut avancer. Même dans l’inconfort.
Galerie Photos
Vidéo
Les plus Les moins
Points positifs
- Direction artistique inspirée et cohérente
- Sound design excellent, au service de l’ambiance
- Énigmes bien pensées, gratifiantes et nombreuses
- Univers inquiétant et immersif
- Fidélité totale aux codes du survival horror old-school
Points négatifs
- Combats lents, imprécis, souvent frustrants
- Narration obscure, parfois inutilement floue
- Rythme cassé par des allers-retours trop fréquents
- Caméras fixes parfois mal placées
- Gameplay rigide, qui rebutera de nombreux joueurs
En conclusion
Tormented Souls 2 est un jeu qui connaît ses références, les respecte, et s’y accroche avec fierté. Il ne cherche pas l’accessibilité, encore moins le consensus. Il vise un public bien particulier : celui qui chérit les survival horror rigides, exigeants, où chaque balle compte, où chaque énigme demande une réelle implication, où l’ambiance prend le pas sur l’action. Dans ce cadre, il réussit son pari. L’univers est oppressant, les puzzles solides, et l’hommage cohérent.
Mais le jeu traîne aussi les défauts classiques du genre : un gameplay parfois daté, des combats peu satisfaisants, un rythme haché et une narration volontairement nébuleuse. Cela limite sa portée. Ceux qui cherchent une expérience fluide, moderne ou narrative auront peu de raisons d’y revenir. En revanche, les amateurs de frissons à l’ancienne y trouveront un terrain familier, rude, mais gratifiant.
Testé par Anthony TAELMAN (Tùni)
"Joueur depuis ma plus tendre enfance, j'ai pris la première claque de ma vie en 1996 avec Resident Evil. Créateur en 2012 de CN Play, et toujours à sa tête, mon expérience de nombreuses années dans le domaine du jeu vidéo est maintenant au service de ma talentueuse équipe."