Avec Nobunaga's Ambition : Awakening Complete Edition, la saga de stratégie historique signée Koei Tecmo poursuit son parcours sans faute, cette fois sur Nintendo Switch 2. Le choix de sortir cette édition complète sur la nouvelle console hybride est ambitieux : un jeu aussi dense, aussi minutieux, peut-il vraiment s'épanouir sur un support pensé pour la portabilité et l’accessibilité ? C’est tout l’enjeu de cette adaptation. Proposant un contenu massif incluant tous les DLC, de nouveaux scénarios et des fonctionnalités exclusives comme la compatibilité avec la fonction souris du Joy-Con 2, cette version vise un public exigeant, capable d’apprécier la subtilité et la lenteur calculée du pouvoir à l’époque Sengoku. Entre conquête territoriale, diplomatie affûtée et administration méticuleuse, ce portage joue la carte de la fidélité tout en cherchant à moderniser l'expérience. Mission réussie ? Oui, en grande partie — mais pas sans quelques accrocs.

Nobunaga’s Ambition n’a jamais été un jeu facile d’accès, et cette édition complète ne fait rien pour simplifier l’entrée en matière. Dès le début, le joueur est bombardé de menus, de paramètres politiques, économiques et militaires, sans véritable tutoriel guidé. Il faut s’armer de patience, expérimenter, lire beaucoup, et accepter de commettre des erreurs pour en comprendre les ramifications. Mais une fois la logique du système intégrée, le jeu révèle une profondeur rare. Chaque officier peut être affecté à des tâches spécifiques (construction, espionnage, commerce, etc.), chaque alliance politique peut se transformer en trahison, et chaque bataille doit être planifiée avec une précision chirurgicale. L’intelligence artificielle ne pardonne pas l’improvisation. Ici, la moindre faiblesse est exploitée par les adversaires contrôlés par la machine. Cette exigence peut rebuter, mais elle constitue aussi la principale richesse de l’expérience. Techniquement, le portage sur Nintendo Switch 2 est solide. Le jeu tourne de manière fluide, que ce soit en mode docké ou portable, avec des temps de chargement très raisonnables. Le confort de jeu est même surprenant en mode nomade, grâce à la bonne résolution de l’écran et à une interface adaptée, bien que parfois surchargée. La fonction souris intégrée au Joy-Con 2 représente une tentative audacieuse pour fluidifier la navigation dans les menus et sur la carte. Sur le principe, c’est une excellente idée : pointer un bâtiment ou une unité comme avec une souris sur PC paraît naturel. Malheureusement, l’exécution manque de précision. La réactivité laisse à désirer, surtout dans les moments intenses où la rapidité de décision est cruciale. Cette latence peut causer des erreurs de manipulation ou rendre certaines actions laborieuses. Cela dit, cette fonction reste optionnelle, et les contrôles classiques à la manette font le travail, avec une configuration bien pensée une fois qu’on a pris le temps de s’y habituer.

L’un des gros atouts de cette édition, c’est évidemment son contenu. Tous les DLC précédents sont inclus : nouveaux scénarios historiques, personnages additionnels, événements narratifs rares, musiques alternatives, fonctions avancées de personnalisation… Il y a de quoi y passer des dizaines, voire des centaines d’heures sans jamais tomber dans la redondance. Le jeu réussit à équilibrer rigueur historique et liberté de choix : il est tout à fait possible de réécrire l’histoire du Japon en inversant les alliances et en propulsant un petit seigneur local jusqu’au sommet de l’archipel. Les portraits des officiers sont soignés, les dialogues concis mais efficaces, et la carte du Japon — bien que stylisée — parvient à évoquer l’époque avec clarté. L’ambiance sonore, avec ses percussions traditionnelles, ses cordes discrètes et ses thèmes martiaux, accompagne parfaitement la gravité des décisions à prendre. L’expérience globale est absorbante, sérieuse, presque méditative par moments. On y entre comme dans un livre d’histoire interactif.

Nobunaga’s Ambition: Awakening Complete Edition ne cherche pas à plaire à tout le monde. Il assume pleinement son identité de jeu de stratégie complexe, lent, méthodique, presque aristocratique dans son approche du pouvoir et du contrôle. Sur Nintendo Switch 2, il trouve une seconde jeunesse, avec une portabilité bienvenue et une richesse de contenu impressionnante. La tentative d’innover avec la fonction souris du Joy-Con 2 est louable, bien qu'imparfaitement implémentée. Pour celles et ceux qui aiment réfléchir, planifier, manipuler dans l’ombre et gagner par la patience et l’intelligence plutôt que par la force brute, c’est une proposition rare et précieuse.