Un hommage assumé aux grands RPG !
Chained Echoes est un jeu indépendant développé principalement par Matthias Linda, un projet qui transpire la passion pour le genre RPG et qui rend hommage aux classiques japonais des années 90 tels que Chrono Trigger, Final Fantasy VI ou encore Suikoden. Mais réduire Chained Echoes à une simple nostalgie serait une erreur. Le titre cherche, et réussit souvent, à proposer sa propre identité à travers une écriture ambitieuse, un système de combat novateur et une ambiance artistique cohérente. Avec l’arrivée du DLC Ashes of Elrant, l’expérience s’enrichit encore, en élargissant l’univers, en affinant certains aspects du gameplay et en offrant un contenu supplémentaire qui prolonge l’aventure. Cet ajout ne se contente pas de donner “plus de la même chose”, il vient creuser des thématiques, proposer des défis inédits et renforcer l’attachement à ce monde déjà dense. Ensemble, le jeu de base et son extension forment une œuvre d’une rare intensité dans le paysage indépendant.
Quand la politique rencontre l’intime
L’un des aspects les plus marquants de Chained Echoes est sans conteste son récit. Contrairement à beaucoup de RPG modernes qui se concentrent avant tout sur l’action ou la mise en scène, ce titre ose s’aventurer dans des thématiques complexes : guerres intestines, luttes de pouvoir, trahisons et manipulations politiques. Le monde de Valandis est décrit avec une minutie remarquable, comme s’il avait vécu bien avant que l’histoire du joueur ne commence. Chaque faction, chaque royaume, chaque groupe de personnages semble avoir une histoire qui s’étend au-delà du simple cadre de la quête principale.
Les personnages principaux sont loin d’être de simples clichés. Glenn, Lenne, Viktor, Sienna et les autres possèdent chacun une profondeur psychologique qui les rend crédibles, parfois même ambigus moralement. On ne suit pas seulement leurs aventures héroïques, mais aussi leurs dilemmes personnels, leurs doutes et leurs contradictions. Le DLC Ashes of Elrant pousse cet aspect encore plus loin : il revient sur certains fils narratifs laissés en suspens dans le jeu de base et offre un développement supplémentaire pour des personnages secondaires qui méritaient d’être mis davantage en lumière. Cet approfondissement rend le monde plus organique et cohérent, mais il peut aussi constituer un obstacle. La densité du récit, la quantité de dialogues et de sous-intrigues risquent de perdre les joueurs qui préfèrent une narration plus simple et directe. Là où certains verront une fresque grandiose, d’autres percevront une complexité parfois excessive. Sur le plan ludique, Chained Echoes frappe fort grâce à son système de combat au tour par tour qui repose sur une mécanique unique : l’Overdrive. Cette jauge évolue selon les actions du joueur et oblige à maintenir un équilibre constant. Si elle est gérée correctement, les personnages profitent d’un boost de puissance et de défense ; si elle est mal maîtrisée, les conséquences peuvent être fatales. Cette idée simple transforme chaque affrontement en un exercice stratégique, où il ne suffit pas d’utiliser ses compétences les plus puissantes, mais de réfléchir au rythme global du combat.
À cela s’ajoutent d’autres mécaniques intelligentes, comme la personnalisation des personnages à travers des pierres de compétences et des améliorations d’équipement, ou encore la possibilité d’explorer le monde en mechs volants, ce qui ajoute une dimension épique aux affrontements. Le DLC Ashes of Elrant affine encore ce système en introduisant de nouveaux ennemis, de nouveaux types de combats et quelques ajustements subtils qui renforcent la tension stratégique. Mais cette exigence, qui fait la richesse du gameplay, peut aussi frustrer. Certains combats sont pensés pour tester à l’extrême la préparation et la maîtrise du joueur, ce qui donne parfois l’impression d’un mur de difficulté. Pour les amateurs de défi, c’est un régal ; pour ceux qui espéraient une progression plus fluide, c’est une source de frustration.
La nostalgie sublimée par une forte identité
Chained Echoes s’impose également par son esthétique et son ambiance sonore. Le pixel art, travaillé avec soin, parvient à évoquer la nostalgie des RPG 16 bits tout en offrant une finesse de détails qui rivalise avec des productions modernes. Les environnements sont variés et mémorables : des forêts luxuriantes aux ruines anciennes, en passant par des cités complexes et vivantes. La mise en scène parvient à compenser l’absence de graphismes photoréalistes en jouant sur les couleurs, les contrastes et l’animation des personnages.
La musique de Eddie Marianukroh accompagne parfaitement cette atmosphère. Chaque morceau est pensé pour renforcer une émotion particulière : tension dramatique lors des combats, mélancolie dans les moments d’introspection, émerveillement face à de nouvelles découvertes. Le DLC Ashes of Elrant ajoute de nouvelles compositions qui prolongent cette immersion et apportent une fraîcheur bienvenue. Toutefois, il faut reconnaître que certaines limites apparaissent. L’interface, assez rigide, manque parfois de clarté et certains choix d’ergonomie rappellent qu’il s’agit d’un jeu indépendant conçu avec des moyens limités. Rien qui gâche l’expérience, mais ce sont des détails qui rappellent la différence avec des productions plus vastes.
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Les plus Les moins
Points positifs
- Scénario mature, riche et ambitieux et DLC qui apporte une vraie valeur ajoutée et développe l’univers
- Personnages nuancés, crédibles et attachants
- Système de combat original et stratégique grâce à l’Overdrive
- Direction artistique pixel art soignée et immersive
- Bande-son remarquable et parfaitement intégrée à l’expérience
Points négatifs
- Courbe d’apprentissage abrupte et combats parfois punitifs
- Narration dense qui peut sembler trop complexe ou confuse
- Interface et ergonomie limitées par les moyens du projet
En conclusion
Chained Echoes et son DLC Ashes of Elrant constituent une expérience marquante pour tout amateur de RPG. Plus qu’un simple hommage, le jeu affirme sa personnalité à travers un récit dense, un système de combat audacieux et une ambiance visuelle et sonore cohérente. Le contenu additionnel n’est pas une extension dispensable, mais un véritable enrichissement qui donne de nouvelles raisons de replonger dans Valandis. Certes, la complexité de la narration et la difficulté de certains combats risquent d’en décourager quelques-uns, mais ceux qui persévèrent découvrent un titre qui n’a pas à rougir face aux monuments du genre. Rarement un projet indépendant aura su proposer une telle ambition, et surtout la concrétiser avec autant de maîtrise.
Testé par Anthony TAELMAN (Tùni)
"Joueur depuis ma plus tendre enfance, j'ai pris la première claque de ma vie en 1996 avec Resident Evil. Créateur en 2012 de CN Play, et toujours à sa tête, mon expérience de nombreuses années dans le domaine du jeu vidéo est maintenant au service de ma talentueuse équipe."