Le bout du tunnel pour Diablo et ses développeurs

C'est par le biais du Washington Post que l'on a appris que certains développeurs de Diablo IV pensent que la date de sortie sera difficile à tenir, notamment à cause d'une mauvaise gestion du projet de la part d’Activision Blizzard. En plus du projet d’acquisition par Microsoft qu’elle souhaite être acté pour fin juin 2023, fin de l’année fiscale, la direction pousserait au “crunch” pour une sortie du jeu au 6 juin 2023.

Une ambiance de travail pas très sereine

Depuis le 15 mai 2012 et la sortie du Diablo 3, les fans attendent avec beaucoup d’impatience ce Diablo IV d’où une certaine pression qui pèse sur ses développeurs. Le Washington Post a recueilli les témoignages d’une quinzaine de développeurs qui font état d'insatisfaction et de malaises croissants au sein des équipes. L’attitude de leur controversé PDG, Bobby Kotick, en justifiant la situation financière par le retard du jeu tout en minimisant l’impact des plaintes pour harcèlement sexuel ne rassure pas les équipes. Kotick pense que les sorties repoussées d'Overwatch 2, sortie en octobre dernier, et de Diablo IV l’ont poussé à tendre la main à Microsoft. Le porte-parole de Blizzard Entertainment lui-même justifie les heures supplémentaires par une nécessité dans toute conception de jeux vidéo. On se rappelle des rumeurs de “crunch” entourant la sortie de Cyberpunk et plus récemment autour d’Elden Ring. À la lecture de certains mails internes, on apprend que l’entreprise ne reconnaît pas le “crunch” mais l’incite implicitement en offrant des avantages au personnel. Des primes de performances sont monnaie courante en guise de motivation notamment par le biais d’attribution d’actions. Comme la valeur des actions est fluctuante, la santé de l’entreprise et donc par extrapolation le succès du jeu met la pression. Il ne faut pas oublier que ce procédé repose sur l’approbation de l’accord d’acquisition de Microsoft. En effet, les versements ne devront pas être effectués par la direction actuelle. Cette ambiance anxiogène pousse certains employés à la démission. De nombreux débrayages et une pétition appelant à la démission de Kotick ternissent l’image d'Activision Blizzard. En mars 2022, le PDG avait pourtant fait part de sa volonté de faire d’ABK “un modèle pour l'industrie, et nous continuerons à nous concentrer sur l'élimination du harcèlement et de la discrimination sur notre lieu de travail”. Malgré ses déclarations, la fuite des cerveaux continue, Activision perd des décennies d'expérience dans tous les domaines et est contraint de les remplacer.



Un développement plus que chaotique

Les équipes de Blizzard travaillent sur Diablo IV depuis plus de 5 ans. Un sentiment d’inertie a atteint les équipes de développement sous la direction de Luis Barriga, le réalisateur, et de Jesse McCree, le lead designer avec des retouches incessantes dans le développement, comme l’abandon du mode Battle Royale. L’attitude et la gestion de McCree sont montrées du doigt par un grand nombre d'employés. On apprend que son éviction a permis de reprendre certains aspects du jeu qu’il avait éliminé. Barriga et McCree auraient été licenciés en août 2021 sans que la direction n'explique la raison, mais on peut facilement penser que les allégations pour harcèlement ne sont pas étrangères à cette décision. De plus, l’arrivée de Sebastian Stepien en tant que creative director en 2019 n’a pas rassuré les équipes de développement. Stepien, malgré son passé en tant que creative director sur “The Witcher 3 “ et en tant que head writer sur “Cyberpunk 2077 semblait être dépassé par la tâche qui l’attendait sur “Diablo IV”. Il a réécrit le script du jeu, en y ajoutant notamment le viol d’une des protagonistes du jeu afin de donner à la série un côté beaucoup plus sombre, ce qui aurait profondément dégoûté un grand nombre de développeurs. Finalement, cette partie du script a totalement disparu, même la direction de Blizzard l’ayant jugé inappropriée. Certains employés pointent également du doigt la façon dont serait représenté le genre féminin dans le jeu en s’appuyant sur le rôle alloué à Lilith. Ces mêmes employés vont jusqu’à qualifier le travail de Stepien de médiocre.



La dernière ligne droite

Annoncé lors de la Blizzcon 2019, pour une date de sortie en 2021 puis repoussé à décembre 2022, Diablo IV sortira finalement le 6 juin 2023. Cette date fixée met plus la pression sur les salariés du jeu notamment par la complexité du système de jeu propre à la série Diablo. Pour atteindre cet objectif, Activision Blizzard a fait appel au studio Blizzard Albany, anciennement Vicarious Visions (développeurs de Skylanders) et à Rod Ferguson, haut responsable au sein du studio The Coalition. En tant que responsable de toute la série Diablo, Ferguson semble avoir été engagé pour respecter les délais, fort de son expérience sur Gears of Wars. L’intégration de Vicarious Visions aux équipes de Diablo IV a été plus que chaotique avec des travaux en parallèle et non en commun. La stratégie d’Activision Blizzard de rajouter des studios au développement ne porterait pas ses fruits, mais aurait eu plutôt tendance à ralentir le processus de création. D’autre part, ce changement de direction n’a pas épargné l'entreprise de nouvelles accusations de discrimination de la part de Jen Oneal, une ancienne chef de studio chez Vicarious Visions. Elle s’est notamment plainte d'inégalités salariales au sein de l’entreprise.

Diablo IV sera-t-il à la hauteur ?

La principale crainte de toutes les équipes travaillant ou ayant travaillé sur Diablo IV serait que le jeu sorte mal fini ou pire, qu’il ne plaise pas à ses fans. Lors de la cérémonie des Game Awards, son trailer somptueux a été plus que remarqués. La bêta ouverte début 2023 aux personnes qui auront précommandé le jeu nous donnera un aperçu. En plus de l’acquisition par Microsoft qui tarde à être approuvé par les organismes de régulation, la sortie du jeu et son succès sont très attendus par les actuels et futurs actionnaires. Le sort des salariés est également au centre des attentions, Microsoft a envoyé des signaux plus que probants pour améliorer les conditions de travail.