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FTC vs Microsoft : résumé de la situation

Maxi Kagemusha par Maxi Kagemusha le 09/01/2023
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Le 3 janvier 2023 fut le premier rendez-vous devant les tribunaux entre la FTC et Microsoft. En effet, c’est à cette date que s’est tenue l’audience préliminaire concernant l'opposition du régulateur américain au rachat d'Activision Blizzard par Microsoft. Cette audience était plus destinée à faire une mise au point de la situation qu'autre chose.

Etat des lieux

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Lors de cette audience préliminaire, nous apprenions que la FTC n’avait pas l'intention d'aller régler le litige auprès d’un tribunal fédéral pour le moment. Selon certains experts, cette posture s’explique par des arguments côté FTC peu solides et qui ne tiendraient pas longtemps devant une cour fédérale. De son côté, la firme de Redmond a tout intérêt à accélérer le processus, elle qui souhaite clôturer ce rachat avant la fin de l’année fiscale, soit fin juin 2023. Pour cela, Microsoft pense que la décision de l’autorité européenne de régulation pourrait intervenir rapidement, mettant ainsi une pression supplémentaire à la FTC. Si aucun accord n’est trouvé entre les deux parties, la position finale du tribunal administratif de la FTC sera donnée en août 2023. En ce qui concerne, la CMA, l’autorité anti-trust britannique, elle a annoncé repousser sa décision au 26 avril 2023 alors qu’elle devait initialement donner sa position début mars. Elle explique ce délai supplémentaire par la complexité du dossier ainsi que par la nécessité d’étudier de manière plus approfondie les différents éléments fournis par les deux parties, mais également par des tiers.


La réaction de Microsoft

Afin de répondre à toutes les réticences de la FTC (Federal Trade Commission), Microsoft a déposé un document de plus de 37 pages. L’organisme de régulation de la concurrence américain avait annoncé le 8 décembre 2022, s’opposer à l’acquisition. Dans ce document, Microsoft justifie à la fois l’acquisition pour près de 70 milliards de dollars d’ABK, mais revient aussi sur l'acquisition de Zenimax en mars 2021. Microsoft confirme leur intention de rendre exclusifs 3 titres majeurs, dont The Elder Scrolls VI et le très attendu Starfield. Cependant, la multinationale minimise l’impact de ces exclusivités. Cela étant, le géant américain a reconfirmé pour la énième fois sa ferme intention de ne pas rendre exclusive la licence au cœur de tous les débats, j'ai nommé Call of Duty. Dans sa réponse, Microsoft va même jusqu'à déclarer que la FTC serait anticoncurrentielle. Cependant, il y a quelques jours, l'entreprise a décidé de revenir sur ses déclarations et retiré cet argument. De son côté, la FTC prétend toujours que cette fusion serait anticoncurrentielle et continue de craindre que Call of Duty devienne exclusif à Xbox au détriment de Sony. Nous avons à ce jour, deux positions diamétralement opposées.



Début décembre, Phil Spencer avait affirmé auprès du podcast Second Request : "il n'y a vraiment eu qu'un seul opposant majeur à l'accord et c'est Sony, et Sony essaie de protéger sa domination”, selon le patron d'Xbox, l'objectif de Sony serait d'empêcher Xbox de croître. La firme Japonaise souhaiterait sans l'ombre d'un doute continuée de profiter d'accords commerciaux sur Call of Duty (accès anticipé et contenus exclusifs) comme c'est actuellement le cas et cela afin notamment de continuer à stimuler ses ventes de consoles. Nul doute qu'il sera beaucoup plus compliqué pour la firme Nippone de négocier ce genre de deal si cette licence considérée comme l'une des plus lucratives du secteur tombait dans l'escarcelle du concurrent. De son côté, le PDG controversé d’Activision, Bobby Kotick, a bien évidemment appuyer les arguments de Microsoft en déclarant : “il n’y a aucune raison sensée et légitime d'empêcher la conclusion de notre transaction”.


Call of Duty au cœur des débats

Le document fourni par Microsoft à la FTC s’articule principalement autour de trois axes. Premièrement, la multinationale explique que rendre exclusif Call of Duty à l'écosystème Xbox serait tout simplement désastreux. En renonçant aux milliards de revenus générés par la vente des jeux sur les autres plateformes, mais aussi en anéantissant tout le travail de fidélisation réalisé par Activision depuis des décennies. L’attrait de Call of Duty réside surtout dans le cross-play, l'exclusivité réduirait cette possibilité et diviserait sa vaste communauté. C’est d'ailleurs dans ce sens qu' Xbox a signé un accord avec Nintendo et Valve pour une durée de 10 ans, accord également proposé à Sony qui n’a pas pris la peine de répondre. En résumé, en rendant COD exclusif , Microsoft aurait plus à perdre qu’à gagner. Malgré cet état de fait, la FTC réfute la volonté de Microsoft de ne pas rendre exclusif le jeu d’Activision en s’appuyant sur des promesses non tenues auprès de l'Union européenne, malgré le démenti de cette dernière, lors de l'acquisition de Zenimax.

Deuxièmement, la FTC prétend que Call of Duty serait une franchise primordiale avec une telle envergure et un impact si grand dans l'industrie que son acquisition par Xbox garantirait au géant Américain une suprématie incontestable face à ses concurrents. À cela, Microsoft rétorque qu’aucun jeu ou franchise n’est assez puissant pour faire basculer le marché en place à l'heure actuelle. En effet, bien que COD soit disponible sur tous les supports (consoles, pc, mobile), il fait face à une concurrence plus qu'agressive de la part de sociétés chinoises comme Tencent qui possède 40 % d’Epic Games, l’éditeur de Fortnite. Ces sociétés, ayant un marché domestique exponentiel. De plus, Xbox met l’accent sur la capacité de Sony de pouvoir rebondir à tout moment grâce à ses licences exclusives comme Horizon Forbidden West, God of War ou encore Spiderman.

Troisièmement, la FTC s’est focalisée sur un marché bipolaire, à savoir Sony et Microsoft tout en occultant Nintendo qui est pourtant le plus gros vendeur de consoles au monde. L'autorité de régulation est persuadée que par ce rachat, le Game Pass, et par extrapolation le Cloud Gaming prendrai une telle importance qu'ils deviendraient un danger pour le consommateur. Pour Microsoft, c’est avant tout un moyen de toucher plus de clients et de ce fait, rendre le jeu vidéo accessible au plus grand nombre. Le régulateur américain pointe aussi du doigt la politique des jeux Day one sur le Game Pass. Pour cela, elle s'appuie notamment sur le fait que jusqu'ici Activision ne souhaitait pas rendre ses jeux disponibles le jour de leurs sorties sur ce genre de services. En effet, l'éditeur a déclaré qu'en-dehors d'une fusion, sur un plan économique et stratégique, la sortie day one d'un de ses best-sellers sur un service d'abonnement n'aurait que peu de sens.

Dans son argumentation, Microsoft insiste sur le fait que pour eux, l'acquisition de la licence Call of Duty n'est pas leur principale motivation, ils expliquent que ce rachat leur permettra avant tout de prendre place sur le marché du jeu mobile de façon pérenne. Pour Xbox, la position de la FTC risque de brider le développement de futurs projets.

Ce n’est que le début

Malgré un accord de 10 ans avec Nintendo et Steam, la FTC pense que la concurrence et les consommateurs, les premiers concernés, sont en péril. L'Union européenne devrait donner sa position en mars 2023 suivi par la CMA en avril. Si les concessions accordées à ses deux organismes suffisent, Microsoft compte bien faire valoir ses décisions pour faire plier le régulateur américain quitte à aller devant un tribunal fédéral. À noter que tous ses organismes de régulation n’ont qu’un avis consultatif. Seule une cour fédérale peut réellement s’y opposer. Au-delà des tumultes de ces rendez-vous juridiques, nous assistons ici à deux modèles économiques qui s’opposent : le schéma dit classique d'achat de jeu qui existe depuis la naissance de cette industrie contre l'arrivée disruptive mais inéluctable des services d'abonnement de plus en plus attractifs. La validation ou l'annulation de ce rachat pourrait bien changer le visage du secteur du jeu vidéo.

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